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Écoanxiété: des jeunes de seulement 13 ans s'inquiètent de l'avenir de la planète

durée 11h40
10 novembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

MONTRÉAL — Des jeunes de seulement 13 ans s'inquiètent tellement de l'avenir climatique de la planète qu'ils remettent en question la fondation éventuelle d'une famille, démontre une nouvelle étude canadienne publiée en marge de l'ouverture de la conférence environnementale COP30, au Brésil.

De manière plus large, environ le tiers des jeunes Canadiens qui ont participé à cette enquête ont dit considérer que l'inquiétude liée aux changements climatiques ― ce qu'on appelle habituellement «l'écoanxiété» ― nuit à leur santé mentale.

«Nous leur avons simplement demandé s'ils pensaient que les changements climatiques avaient un impact sur leur santé mentale. Et si la réponse était oui, nous voulions savoir comment, d'après leur expérience, cela se manifestait, a expliqué l'auteure de l'étude, la professeure Gina Martin de la faculté des sciences de la santé de l'université albertaine Athabasca.

«Nous avons beaucoup de théories qui s'appuient sur des preuves assez solides, mais nous voulions voir si l'expérience des jeunes correspondait à nos théories existantes.»

Mais ses collègues et elle ont voulu ratisser plus large que le seul thème de l'écoanxiété, a-t-elle précisé: en demandant aux jeunes s'ils considèrent que les changements climatiques ont un impact sur leur santé mentale, en leur posant des questions ouvertes et en leur demandant de décrire en leurs propres mots un impact éventuel, «on a voulu voir si on n'allait pas trouver autre chose».

Un peu plus de 800 jeunes âgés de 13 à 18 ans et issus de toutes les régions du Canada ont répondu à un questionnaire en ligne entre octobre et novembre 2023. Cent trente-cinq participants provenaient notamment de l'Ontario, 128 du Québec, 52 de la Nouvelle-Écosse et 48 du Nouveau-Brunswick.

Les auteurs de l'étude ont expliqué avoir fait un effort pour rejoindre de très jeunes participants, puisque la plupart des études sur l'écoanxiété ont porté sur des jeunes de 16 à 25 ans.

Les participants à l'étude ont révélé que des événements climatiques tels que les feux de forêt ou les événements de chaleur extrême leur procurent des sentiments comme la peur, l'anxiété ou l'inconfort émotionnel. Ils ont aussi exprimé leur frustration envers ce que les auteurs de l'étude appellent «les obstacles systémiques à l'action climatique».

Les participants ont par ailleurs témoigné des répercussions des changements climatiques sur leur santé mentale, «résultant de leur exposition à des informations liées au climat et d'une prise de conscience générale» des changements climatiques, écrivent les auteurs.

Les changements climatiques peuvent «être une source de stress pour de nombreux adolescents, et (leur) caractère imprévisible et (leur) gravité peuvent perturber leur quotidien et créer un sentiment d'instabilité», ajoutent les chercheurs, ce qui peut aller jusqu'à interférer avec leur sommeil ou leur performance à l'école.

«De plus, certains participants ont exprimé leur inquiétude et leur culpabilité à l'idée de mettre des enfants au monde dans un monde en déclin, ce qui rejoint les débats sociétaux plus larges sur la moralité d'avoir des enfants face aux changements climatiques actuels», ont souligné les chercheurs.

Cette révélation, a dit Mme Martin, est d'autant plus frappante que les auteurs de l'étude n'ont pas demandé directement aux jeunes si leurs préoccupations face aux changements climatiques étaient suffisamment importantes pour les amener à questionner la fondation éventuelle d'une famille: ce sont plutôt les jeunes eux-mêmes qui ont soulevé le sujet.

«C'est assez intense d'avoir ce genre de pensées quand on est jeune et qu'on réfléchit à ce qu'on veut faire de sa vie, à quel genre de travail on veut exercer, où on veut aller, a estimé Mme Martin. C'est une période cruciale de la vie, et le fait que les changements climatiques aient un impact sur cela est également important en termes de bien-être des gens.»

Plusieurs participants à cette étude ont décrit les effets des changements climatiques sur leur santé physique, tels que maux de tête, faiblesse physique et problèmes respiratoires, lorsqu'on leur a demandé comment les changements climatiques affectaient leur santé mentale.

Ces résultats, disent les auteurs, «confirment que les effets physiologiques constituent un vecteur par lequel les changements climatiques affectent la santé mentale des adolescents, (...) la santé physique et la santé mentale étant liées».

«Je pense que nous devons faire mieux (...) lorsque nous réfléchissons aux impacts des changements climatiques et que nous voulons les atténuer, a conclu Mme Martin. Nous savons que cela va avoir un impact sur les jeunes et nous savons que cela va être disproportionné tout au long de leur vie par rapport à la nôtre. Nous devons donc intégrer leur voix dans le processus de planification et nous assurer que nous pensons à leur bien-être de manière holistique, en leur apportant beaucoup de soutien et en élaborant des stratégies d'atténuation en tenant compte de leurs besoins.»

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal médical PLOS Mental Health.

Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne