Un jeu de rôle replonge les participants dans le Montréal ouvrier du début du siècle


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Par La Presse Canadienne, 2025
MONTRÉAL — Des organisations se tournent de plus en plus vers des solutions un peu théâtrales, comme les jeux de rôle, pour attirer les touristes.
Par exemple, un nouveau jeu de rôle organisé à Montréal permet à ses participants de découvrir, ou de renouer avec le quartier Hochelaga à travers une lentille historique, en effectuant un retour dans le temps à l’époque du Montréal du XXe siècle.
Le jeu «Viridis - 1001 trésors de l’Est» est une activité éphémère conçue par Alexia Bhéreur-Lagounaris et son équipe, qui propose un parcours suivant les codes de la chasse au trésor et des soirées meurtre et mystère.
L’histoire se déroule en 1911, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Les participants sont appelés à incarner les rôles de personnages ayant marqué le quartier ouvrier de l’est de Montréal à cette époque, comme le fondateur du journal Le Devoir, Henri Bourassa, ou l’héroïque détective Georges Farah-Lajoie, pratiquement disparu de la mémoire collective.
Le parcours, qui dure entre 1 h 30 et 3 h, se fait entièrement à la marche en utilisant les moyens et des objets d’antan. Les costumes sont plus que les bienvenus, mais les téléphones intelligents ne le sont pas, insiste Mme Bhéreur-Lagounaris, qui a créé cette activité avec l’objectif de favoriser les rencontres sociales et de s'immerger dans le patrimoine historique, parfois méconnu, de la Métropole.
«En 1911, il n'y a pas aussi longtemps en fait, quand tu cherchais quelque chose, tu voulais obtenir de l'information, tu allais parler à quelqu'un», explique-t-elle.
Ainsi, pour venir à bout de leur quête, les participants doivent interagir, non seulement entre eux, mais également avec la vingtaine de partenaires et commerçants du quartier qui ont accepté de se prêter au jeu.
Des parcours semblables
L’entreprise à but non lucratif de conception de jeux de rôle ABLBLALAB, fondée par Mme Bhéreur-Lagounaris, a organisé des parcours similaires dans deux autres quartiers de Montréal: le Mile-End, en 2016, et le Quartier latin en 2020.
«Le principe est toujours d'utiliser les données historiques de l'endroit, voir qu'est-ce qui est intéressant à faire ressortir, de quelle époque. Et après de coudre autour des personnages historiques qui ont vécu, qui étaient de vrais humains comme nous tous, avant qu'ils deviennent un peu des symboles ou des noms de rue», raconte la conceptrice de jeux.
Au fil de ces expériences, elle a constaté que ses jeux de rôle permettent aux participants de «créer un lien affectif avec le lieu», en empruntant les mêmes rues que ceux et celles qui ont façonné la métropole au début de XXe siècle.
Catherine Watts Cohen, une participante et blogueuse de jeux de société, admet que son impression du quartier, qu’elle associait à «la pauvreté», a changé après cette activité.
Le jeu de rôle lui a fait voir le quartier au-delà des préjugés, lui permettant de découvrir «les activités et la belle vie communautaire dans le quartier».
«Ce genre d’expérience là peut participer à avoir un affect positif à un lieu», croit Mme Bhéreur-Lagounaris. C’est pour ça que j’ai appelé le projet 1001 Trésors de l’Est, c’est qu’il y a énormément de choses intéressantes, qu’il s’agisse des gens ou des endroits géographiques qui sont très beaux et viennent d’une autre époque».
Par ailleurs, la conceptrice dénote une augmentation de l’intérêt du public pour les activités qui mêlent le social au ludique.
«J’ai de plus en plus de clients qui m’appellent pour et qui disent: “On aurait besoin de faire du team building sans technologie, on veut plus nos bidules électroniques” et je le vois comme un signe que les gens sont à la recherche de connexion avec le réel.»
«En jouant, j'ai ressenti de l'entraide en faisant de nouvelles rencontres», raconte Mme Watts Cohen. Elle et son groupe se sont réunis pendant quelques heures après la partie dans un bar de quartier pour revenir sur leur aventure.
«Dans ce genre d'activité là, la conversation qui suit est aussi plaisante que le jeu».
Samira Ait Kaci Ali, La Presse Canadienne