L’irrévérencieux révérend Scott
Les premières années du protestantisme à Sorel sont marquées par la présence d’un être particulier : Thomas Charles Heslop Scott (vers 1753-1813). Son biographe, T. R. Millman, constate même qu’il « n’y a pas grand-chose de certain dans la vie » de son sujet !
Dans un autre document d’époque, ce dernier est qualifié de « personnage turbulent ». Scott fait son apparition à Sorel en 1777, alors qu’il rejoint son régiment (34e), au sein duquel il est aumônier adjoint. Cherchant à s’affirmer comme un leader spirituel, il trouve toutefois plusieurs embûches sur sa route, à commencer par l’animosité que soulève son attitude chez les autorités militaires.
L’aumônier adjoint finit, en effet, par se brouiller avec son commandant, Barrimore Matthew St. Leger, qui le congédie en 1781 pour inconduite et insubordination. Au même moment, le gouverneur Frederick Haldimand lui interdit carrément de pratiquer le culte dans la colonie. Scott riposte en publiant la correspondance qu’il a échangée avec son ancien commandant.
Rien de tout cela ne l’arrête, puisque quelques citoyens se rallient autour de lui, en souscrivant même pour un salaire. Les militaires sorelois, sur l’ordre du baron Friedrich Riedesel, s’empressent toutefois d’enrayer cette initiative en faisant pression sur ces loyalistes qui sont toujours dans un état précaire, après avoir fui les futurs États-Unis.
L’embêtant homme de foi se défend alors en poursuivant le capitaine John Barnes pour intimidation auprès de ses fidèles. Ce dernier le surnommait d’ailleurs, en dérision, « l’irrévérend M. Scott ».
Continuant de résister à la pression des autorités, le cas de ce ministre insubordonné est finalement placé devant l’évêque de Londres en personne, en juin 1784. Le constat de ce dernier est des plus sidérants : Scott n’a jamais été ordonné ! Conclusion confirmée par un conseil d’enquête établi en 1787, qui annonce le début de la fin des aventures de ce curieux personnage à Sorel.
Malgré l’arrivée de John Doty, premier pasteur de la mission Christ Church en 1784, et la rebuffade que lui inflige l’évêque de Londres, l’imposteur Scott continue de faire des siennes. Par contre, ses quelques irrésistibles fervents commencent à l’abandonner. Doty ne se gêne d’ailleurs pas pour qualifier ces adeptes de disciples abrutis.
En 1788, il est finalement débarrassé de la présence de son rival, alors que celui-ci quitte pour Québec, où l’histoire montre qu’il ne s’y assagit pas…
Pour en savoir plus sur Scott, consulter la biographie de Thomas R. Millman dans le Dictionnaire biographique du Canada.
Mathieu Pontbriand, Société historique Pierre-de-Saurel
www.shps.qc.ca
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