Le commissaire d’école
L’enseignement est laissé entièrement à l’initiative privée et religieuse jusqu’en 1801, date à laquelle une première loi canadienne met fin officiellement au monopole traditionnel de l’enseignement privé.
À partir du moment où cette loi est créée, l’État ne peut laisser les instituteurs soumis au pouvoir local – notamment des maires et des curés. Donc, deux fois par année, un inspecteur d’école procède à l’évaluation des bâtiments, des enseignants, des élèves, des fonds du secrétaire-trésorier et des registres des commissaires, et prépare un rapport qu’il transmet ensuite au Département de l’Instruction Publique – qui est l’équivalent du ministère de l’Éducation du Québec aujourd’hui.
« Département de l’Instruction Publique
Québec, 5 février 1894
Monsieur V. Beaudreau, secrétaire-trésorier
St-David, Yamaska
Monsieur,
J’ai l’honneur de vous informer que M. l’inspecteur d’écoles Lippens à qui j’ai transmis votre lettre du 16 janvier en lui demandant de me donner son opinion m’a fait le rapport qui suit.
[…] Dans mon opinion, les Commissaires d’école de St-David, Yamaska, ont agi sagement en réunissant en un seul les arrondissements N°2 et N°6 et en ouvrant une école dans l’arrondissement nouveau ainsi formé. Au meilleur de ma connaissance, cet ancien arrondissement N°6 n’aura jamais assez d’enfants pour qu’il vaille la peine d’y ouvrir une école et par conséquent, il ne servirait à rien de mettre de côté dans une banque la part des fonds qui lui revient, puisqu’on n’aura jamais l’occasion de le dépenser dans l’arrondissement même pour des fins scolaires, comme le veut la loi.
Je crois qu’une partie des contribuables se rapprocheraient des écoles en se faisant annexer à une des municipalités voisines. Je vous prie de recommander aux commissaires de considérer favorablement toute demande qui leur serait adressée dans ce sens. […]
Je partage complètement la manière de voir de M. l’Inspecteur Lippens sur cette question.
J’ai l’honneur d’être, Monsieur, votre obéissant serviteur,
Gédéon Ouimet, surintendant »
Comme nous pouvons le constater par cette lettre, le travail des instituteurs était ainsi supervisé directement par l'inspecteur du Département de l'Instruction Publique et les commissaires d'école. Même si la visite de l’inspecteur rendait toute l’école très nerveuse, il reste que ce dernier permettait à l’établissement de compter sur un appui sérieux lorsque des améliorations devaient être apportées.
La laïcisation de l’enseignement fut l’une des principales transformations apportées par la Révolution Tranquille dans les années 1960. Le ministère de l’Éducation fut fondé en 1964 et le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport – tel que nous le connaissons de nos jours et constitué en partie du précédent – est créé en 2005.
Fait tout à fait intéressant, l’auteur de cette lettre, Gédéon Ouimet, a été le deuxième premier ministre du Québec en 1873 et 1874 – le premier étant Pierre-Joseph-Olivier Chauveau de 1867 à 1873. M. Ouimet, en plus d’être Surintendant de l’Instruction publique de 1876 à 1895, a été président de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal en 1869 et 1870 et maire de Vaudreuil de 1852 à 1854.
Le pont construit au-dessus de la rivière des Mille-Îles, sur le parcours de l’autoroute des Laurentides et reliant les villes de Boisbriand et de Laval, a été nommé en son honneur.
Mylène Bélanger, archiviste en chef, Société historique Pierre-de-Saurel
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