Février 2009. Le Québec est secoué par le terrible drame qui frappe Piedmont : Guy Turcotte assassine ses enfants, puis tente de mettre fin à ses jours. Au-delà du procès largement médiatisé de cette sordide histoire, on oublie souvent que de tels drames ne sont pas des cas uniques et isolés.

Au Québec, de 15 à 20 femmes sont tuées par leur conjoint ou ex-conjoint chaque année et parfois, le meurtre se transforme en drame familial, allant jusqu'à l'assassinat des enfants. Mais pourquoi certains hommes en viennent-ils à commettre l'irréparable? Présenté le 28 novembre dernier dans le cadre des 25 années d’existence de la Maison Le Passeur de Sorel-Tracy, le documentaire L'amour qui tue tente de faire la lumière sur ce sujet.  

Ce film, réalisé par Joël Bertomeu, a été présenté sur les ondes de Canal Vie en 2008. À la fois audacieux et choquant, l’ensemble de son contenu ne fait pas l’unanimité chez les intervenants locaux, mais comme le concède Martin St-Germain, directeur général de la Maison Le Passeur, ce documentaire est le seul qui s’interroge et qui cherche à comprendre comment des hommes peuvent en venir à tuer leur femme et leurs enfants. Si chaque cas est différent, on s’entend sur un dénominateur commun : la souffrance extrême que vivent ces hommes qui, trop souvent, la taisent.

Déceler les signes avant-coureurs

Parler de ce sujet sur la place publique, c’est déjà un pas vers la sensibilisation et la prévention. Pour Christine Drouin, chercheuse au Centre de recherche interdisciplinaire sur la violence familiale et la violence faite aux femmes (CRI-VIFF), il faut être attentif aux signes avant-coureurs, car ils sont toujours là.

« La séparation est vraiment un facteur clé, puisque 75 % des homicides ont lieu dans ce contexte. La période la plus à risque, ce sont les trois mois suivants l’annonce de rupture et la prise de conscience, par l’homme, que la séparation est définitive et qu’il n’y a plus d’espoir. Par ailleurs, dans 60 % des cas, il y avait des antécédents de violence conjugale au sein du couple et dans 70 %, les policiers avaient déjà été appelés au domicile auparavant », fait remarquer Mme Drouin.

Toutefois, nuance-t-elle, « ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de violence, qu’il n’y a pas de risques. » La jalousie maladive, les soupçons non fondés d’infidélité, le contrôle extrême de l’homme sur sa conjointe ou encore, le harcèlement ou les menaces de mort sont à prendre au sérieux.

Il faut aussi savoir que dans la majorité des cas, l’homicide est planifié dans la tête de l’homme et aura lieu, bien souvent, au domicile de son ex-conjointe ou à proximité. Une fois le crime commis, le suicide va suivre dans un tiers des cas.

Pour éviter que de tels drames ne se reproduisent, il faut être à l’écoute des messages que peuvent lancer les hommes autour de nous et éviter de les juger dès qu’ils s’expriment. Par exemple, illustre la chercheuse, on n’hésite pas à questionner celui qui parle de sa conjointe ou de son ex-conjointe en tenant des propos haineux, qui change drastiquement de comportement dans le milieu de travail, qui s’absente souvent ou tient des propos suicidaires. On a des doutes? On peut appeler la police ou demander conseil aux organismes de la région.

Ressources d’aide dans la région de Sorel-Tracy

* Maison Le Passeur : programme de thérapie individuelle et de groupe pour hommes en difficulté : 450 743-8403 ou www.maisonlepasseur.com

* Maison La Source : maison d’aide et d’hébergement pour les femmes victimes de violence ou en difficulté, avec ou sans enfant : 450 743-2821

* Centre de prévention du suicide Pierre-De Saurel : écoute téléphonique 24 heures/24, 7 jours/7 : 450 746-0303 ou www.cpspierredesaurel.com

* CLSC Gaston-Bélanger (CSSS Pierre-De Saurel) : services psychosociaux avec ou sans rendez-vous : 450 746-4545 ou en personne.